Analyse.. Le concept d’aléa en assurance (2ème Partie)

Au cours de l’histoire, l’assurance a connu une évolution marquée par plusieurs étapes :

1.1 – La période pré-assurance

On retrouve des « traces » de la pré-assurance dans la plus haute antiquité :

  • Caisse d’entraide des tailleurs de pierres de la Basse – Égypte ;
  • 250 ans avant J.C., dans le Code d’Hammourabi, en ce qui concerne les transports par caravane (Darmatha) ;
  • Le législateur athénien Solon (640-558 avant JC.) obtint des Hétairies (groupements et artisans) leur intervention en faveur de leurs membres frappés par l’adversité ;
  • Théophraste (371-286 av. JC.) fait état d’une caisse commune alimentée par des cotisations, et dont le contenu servait à prodiguer des secours ;
  • A l’époque romaine, le collège funéraire de Lanuvium assure à ses membres, moyennant droit d’entrée et cotisations, un bucher et un tombeau, tandis que les légionnaires cotisent pour permettre à leur membres de faire face à des frais de mutation, de retraite, ou de décès.

1.2 – Nécessités du commerce maritime

A. Les Romains et les Athéniens pratiquaient le mécanisme qui a donné lieu au « prêt à la grosse aventure », et selon lequel le prêteur de deniers touchait un intérêt allant de 15 à 40 % si la cargaison arrivait à bon port. Mais cette pratique fut frappée dans le temps d’interdiction par les autorités religieuses, comme usuraire, et fut frappée d’interdit par Grégoire IX en 1227. C’est pour cette raison que de riches commerçants s’engagèrent à « garantir » une cargaison moyennant le paiement préalable d’une somme d’argent.

C’est dans le domaine des risques maritimes qu’est apparue la notion d’assurance, comme l’attestent les lois Rhodiennes du VIIIe siècle, le statut de Marseille de 1256, ou encore les Statuts Maritimes de Venise de 1255. Un des plus anciens contrats a été retrouvé à Gènes en 1347 et est destiné à garantir un transport de marchandises contre les aléas d’un voyage. Les premières compagnies d’assurance maritime apparaissent en 1424 à Gènes, puis en Angleterre avec des Clubs de particuliers.

B. En France, l’assurance maritime a été pratiquée à Rouen par des assureurs espagnols, comme en font foi les actes de Tabellionage[1] des années 1525 à 1530 qui reprennent des pratiques espagnoles de Séville ou de Bilbao, selon deux types de transports : Assurance sur un bateau déterminé jusqu’au port de Rouen, portant sur des marchandises débarquées au Havre ou Barfleur, et retransportées sur embarcations plus légères jusqu’à Rouen.

Quelques contrats ont été répertoriés en France tels que :

  • Assurance sur un navire dont le nom est encore inconnu lors de la souscription du contrat, à charge de dénoncer le nom du vaisseau à bref délai à l’assureur.
  • Un contrat français a été conclu en Octobre 1584 pour un transport de marchandises entre Marseille et Tripoli. Les statuts de Marseille s’inspirent des dispositions maritimes florentines. Une réglementation accompagne ces premières conventions: Un Edit de 1563 institue une juridiction consulaire à Bordeaux.
  • En France, le Guidon de la Mer, rédigé vers 1570 et édité en 1608, réunit les usages en vigueur dans les différents ports français et stipule : «Guidon utile et usance des marchands qui mettent à la mer, traitant des assurances, marchandises à la mer, Pollices, avaries, et autres choses nécessaires à la navigation».
  • Mais c’est la Grande Ordonnance de la Marine, œuvre de Colbert inspirée des coutumes et statuts des Provinces Unies (Amsterdam et Anvers).
  • C’est par Edit du Conseil du Roi du 5 Juin 1668 qu’est instituée par Colbert la Chambre des Assurances Maritimes de Paris.
  • Le Code de Commerce de 1807, exécutoire à compter du 1er janvier 1808, consacre son Livre II au Droit Maritime, et incorpore dans ses articles 332 à 396 les premiers principes du droit des assurances.

L’assurance s’est développée dans un but de protection de l’intégrité des patrimoines contre les risques de toute nature pouvant les affecter. Son évolution est directement liée à celle de société et de l’activité économique. De nos jours, l’ampleur des échanges internationaux renforce la nécessité d’assurance de cette activité économique.

[1] Source : Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales – En période antique romaine, le mot tabellion signifie officier public chargé de la rédaction des contrats et des actes publics.

Mohamed Jamal BENNOUNA Ingénieur

Expert et Docteur en Droit

Professeur associé au CNAM – Paris Email :

[email protected]

 

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